vendredi 23 mai 2014

SUR LA PRIÈRE (5) par St JEAN CHRYSOSTOME :sans la prière, rien de bon , rien d'utile au salut ne nous arriverait.

L'exemple du Publicain nous prouve que la prière purifie aisément l'âme pécheresse, car ayant demandé à Dieu le pardon de ses fautes il l'obtint aussitôt ; nous l'apprenons encore par l'exemple du lépreux qui ne se fût pas plutôt présenté devant Dieu qu’il fut sur-le-champ guéri (Luc XVIII;13). Dieu rend sur-le-champ la santé au corps malade, à plus forte raison la rendra-Il miséricordieusement  à l'âme  souffrante : plus l'âme l'emporte en excellence sur le corps, plus il est vraisemblable que Dieu lui témoigne de la sollicitude. ll serait facile de citer une infinité de traits antiques et récents, si l’on voulait énumérer tous les hommes qui ont dû leur salut à la prière.

L'une de ces personnes qui ne se sent point de zèle ni de ferveur dans la prière, objectera peut-être ces paroles du Sauveur : "Quiconque me dira : Seigneur, Seigneur, n'entrera pas pour cela, dans le royaume des cieux mais celui qui accomplit la volonté de mon Père qui est au ciel" (Mat. VII, 21). Si je prétendais  qu'il suffit à notre salut de la prière, c’est à bon droit  qu'on m'opposerait ces paroles : comme je reconnais seulement dans la prière la source de tous les biens, le fondement et la racine de toute vie vertueuse, que l’on n’aille plus se servir de ces paroles pour se justifier de sa négligence.

Ni la chasteté  seule et privée des autres biens ne saurait nous sauver, ni le soin des pauvres, ni la bonté, ni toute autre vertu ; il faut que toutes ces choses concourent dans nos âmes. 
Or c'est la prière qui leur sert de fondement et de principe. De même que la solidité d’un vaisseau et d’un édifice dépend de la solidité des parties inférieures, ainsi notre vie dépende de la consistance de la prière ; sans la prière, rien de bon , rien d'utile au salut ne nous arriverait. C'est pourquoi Paul ne cesse de nous exhorter avec insistance : "Persévérez dans la prière, nous dit-il, passez vos veilles à prier et et rendre grâces. — Priez sans relâche, dit-il ailleurs, rendez grâces en en toutes choses car telle est la volonté de Dieu. — Priez en tout temps et en esprit, ajoute-t-il encore; veillez pour cela et persévérez dans la prière (Col. VI, 2- Thes. V,17,18 - Ephes. VI, 18). C'est par ces pressantes et divines paroles que le chef des apôtres nous appelle à la prière. Puis donc que nous sommes ses disciples, ne cessons pendant notre vie de prier et d'arroser continuellement nos âmes de ces eaux rafraîchissantes. (à suivre)

dimanche 18 mai 2014

SUR LA PRIÈRE (4) par St JEAN CHRYSOSTOME : l'arme redoutable de la prière

St Prophète Jonas
En premier lieu ce sont les Ninivites qui nous apparaissent comme ayant été délivrés, par la prière, de tant  de crimes innombrables envers Dieu (Jonas III). Dès que la prière eut pénétré dans leur cœur, elle y ramena la justice, arracha en un moment la ville à l'impureté, à l'iniquité et aux prévarications dans lesquelles elle était plongée ; plus forte que des habitudes invétérées, elle y établit le règne des lois célestes, et y implanta avec elle la chasteté, l'humanité , la mansuétude et le soin des pauvres. C'est le cortège sans lequel la vertu ne saurait habiter dans une âme ; dans toutes les âmes où elle établit sa demeure, elle y amène toute justice, elle les forme à la vertu et en bannit le vice. Si quelqu'un fût entré dans la ville de Ninive, connaissant ce qu’elle était autrefois, il ne l’eût certainement pas reconnue, tant ce passage d’une vie de crimes à la piété avait été rapide. De même qu’on ne reconnaîtrait point une femme pauvre et couverte de haillons, si on la rencontrait ensuite couverte de vêtements d’or ; de même quiconque eût vu auparavant Ninive dans son indigence et dans sa pauvreté en fait de trésor spirituels, eût ignoré quelle était cette ville dont la prière avait si profondément bouleversé les coutumes et mœurs, et qu’elle avait ramenée à la vertu. Une femme aussi, après avoir passé toute sa vie dans l'impureté et la débauche, ne fit que se jeter aux pieds du Christ, et elle en obtint le salut. Mais la prière ne se borne pas a effacer les péchés, elle conjure les dangers les plus pressants.



David, ce roi et ce prophète également admirable, remporta par la prière  de nombreuses et difficiles victoires; ne donnant à ses soldats d’autre arme que la prière, et leur permettant ainsi de vaincre dans la sécurité et le calme. Les autres rois mettaient leurs espérances de salut dans l'habileté et l'expérience des généraux, dans leurs archers, leurs l'antassins et leurs cavaliers, mais le grand roi David donnait pour boulevard à son armée de saintes prières : il ne jetait point ses regards sur les sourcils de ses généraux et des chefs de son infanterie et de sa cavalerie, il n'amassait point de l'argent, il ne préparait point des armes; c'est du Ciel qu'il attendait toute sorte d’armes divines. Car la prière est en vérité une panoplie divine et céleste, et il n'en faut pas d'autre pour protéger efficacement ceux qui s'abandonnent à la conduite de Dieu. Bien souvent l'habileté et la valeur des fantassins, l'expérience et les ruses des archers sont déconcertées par la vigilance de l'ennemi, par le courage des adversaires, et par plusieurs autres moyens. Quant à la prière, c'est une arme irrésistible, un bouclier impénétrable, qui repousse un soldat et des milliers de légions avec la même facilité. Cet admirable David triompha de Goliath, qui se précipitait sur lui comme un démon terrible, non par le glaive et les armes, mais par la prière. Ainsi, la prière est pour les rois une arme redoutable dans les batailles; elle est pour nous une arme redoutable centre les démons. Ainsi le roi Ezéchias triompha dans la guerre contre les Perses sans avoir mis d'armée on campagne. et n'ayant opposé que ses prières à la multitude de ses ennemis. Ainsi il échappa à la mort en se prosternant avec une piété touchante devant le Seigneur, en sorte que la prière seule rappela ce prince à la vie. (I Rois17 ; IV Rois19 ; Is. 37) (à suivre)

dimanche 11 mai 2014

SUR LA PRIÈRE (3) par St JEAN CHRYSOSTOME : la prière est pour les maladies des âmes un remède souverain

Sans l'assistance divine, aucun bien n'entrerait dans nos âmes. Dieu, par son assistance, partage nos peines et les allège singulièrement, lorsqu'Il voit que nous aimons la prière, que nous l'implorons assidûment, et que nous espérons obtenir par cette voie toute sorte de biens. Quand je vois une âme qui n’aime pas la prière et qui n'a pas pour elle une affection vive et ardente, c'est une preuve pour moi qu’il n’y a rien de grand dans cette âme. Quand je vois, au contraire, une âme qui ne se rassasie jamais d’honorer Dieu et qui met au nombre de ses plus grands malheurs celui de ne pouvoir prier sans cesse, je découvre dans cette âme le culte solide de toutes les vertus et le temple même de Dieu. 

Si, d’après le sage Salomon, le vêtement d’un homme, sa démarche, son sourire publient ce qu’il est, à plus forte raison les prières et la piété seront-elles un indice d’une parfaite justice : vêtements spirituels et divins, elles répandent sur nos âmes la grâce et la beauté, elles ordonnent la vie de chacun de nous, ne permettent pas qu'aucun sentiment de malice ou de folie règne dans notre coeur; elles nous pénètrent de respect pour Dieu et pour les honneurs qu'Il nous dispense, nous instruisent à repousser toutes les illusions de l'esprit pervers, à mettre en fuite les pensées indignes et honteuses, et nous inspirent à tous le mépris de la volupté. 

C'est le seul orgueil qui convienne aux serviteurs du Christ de se refuser à servir l'ignominie, et de maintenir leur âme dans la pureté et dans la liberté. Du reste, tout le monde comprend aisément, j'aime à le croire, l'impossibilité absolue de pratiquer la vertu sans la prière, et de la pratiquer durant toute la vie. Et comment pratiquer la vertu, si l’on ne va se prosterner fréquemment aux pieds de Celui qui la dispense et qui la donne ? Comment désirer d'être chaste et  juste, si l’on n’est point heureux de s'entretenir avec Celui qui nous demande ces vertus et bien d’autres encore ? Je veux vous montrer brièvement que, fussions-nous couverts de péchés, la prière nous en purifie aussitôt. Après cela, quoi de plus noble, quoi de plus divin que la prière puisqu'elle est pour les maladies des âmes un remède souverain ? (à suivre)



mercredi 7 mai 2014

SUR LA PRIÈRE (2) par St JEAN CHRYSOSTOME : Celui qui ne prie pas Dieu… c'est un cadavre


Que vous soyez épris de la virginité, que vous ayez préféré une union chaste et honorable, qu'il vous faille dompter le ressentiment, pratiquer la douceur, repousser l’envie, ou pratiquer toute autre vertu, si la prière vous guide et vous aplanit le chemin, vous fournirez aisément et promptement la carrière de la piété. Il ne pourrait se faire, non, il ne pourrait se faire que l’on demandât à Dieu la chasteté, la justice, la douceur, la bonté, et qu’on ne fût pas exaucé.  

"Demandez, disait le Sauveur, et l'on vous donnera; cherchez, et vous trouverz; frappez, et l'on vous ouvrira ; car quiconque demande reçoit, quiconque cherche trouve. et  l'on ouvre à celui qui frappe. - Qui d'entre vous, disait-Il ailleurs, si son fils lui demande du pain, lui donnera une pierre:s'il lui demande un poisson, est-ce qu'il lui donnera un  serpent ? Si donc vous, tout méchants que vous êtes, vous savez  donner à vos enfants des choses salutaires, combien plus votre Père céleste donnera-t-il l'Esprit Saint à ceux qui le lui demanderont ! " (Mat IX, 7; Luc. XI. 11-13)

 C’est par ce langage, c'est par ces espérances que le Seigneur de toutes choses nous invitait à prier. À nous donc d’obéir à Dieu, de passer notre vie dans 1a prière et dans les hymnes, et de nous attacher plus étroitement au culte de Dieu qu'à notre propre vie. De cette manière nous vivrons comme il convient à des hommes de le faire. Celui qui ne prie pas Dieu, et qui ne désire pas jouir sans cesse de ces entretiens, c'est un cadavre, qui n’a ni âme, ni sentiment. L’un des signes les plus frappants de stupidité, c’est en effet de ne pas comprendre la grandeur de cette dignité, de ne pas chérir la prière et de ne pas regarder comme la mort de l'âme, l'indifférence à rendre à Dieu nos hommages. De même que notre corps, séparé de 1’âme, n'est que cadavre et pourriture ; de même notre coeur  lorsqu'il ne s’adonne pas à la prière n’est qu'un cadavre misérable et infect.   Que la privation de la prière doive être estimée plus amère que la mort, le grand prophète Daniel nous l’a clairement enseigné, lui qui aima mieux mourir que de passer trois jours sans prier (Dan. VI,10). Ce n’était pas par impiété que le roi des Perses lui avait imposé cet ordre, mais uniquement pour avoir trois jours entiers à lui. (à suivre)

vendredi 2 mai 2014

SUR LA PRIÈRE (1) par St JEAN CHRYSOSTOME

Deux raisons nous incitent à admirer et de plus à estimer bienheureux les serviteurs de Dieu : premièrement parce qu'ils ont mis toute leurs espérances de salut dans la sainteté de la prière, en second  lieu parce qu'ils ont conservé par écrit les hymnes et les prières qu'ils offraient à Dieu avec joie et tremblement, et qu'ils nous ont transmis leur trésor, afin d'inspirer le même zèle à toute la postérité. Il convient en effet que les moeurs  des maîtres passent aux disciples ; il convient que les auditeurs des prophètes deviennent les imitateurs de leur justice, de manière à ce que nous consacrions notre vie à prier, à honorer et à servir Dieu, faisant consister à le prier avec une âme innocente et pure, notre vie, nos richesses, et le comble du bonheur.

Ce que la lumière du soleil est pour le corps, la prière l'est pour l'âme, si c'est un malheur pour un aveugle de ne pas voir le soleil, quel malheur ne sera-ce pas pour le chrétien de ne pas prier sans cesse, et de ne pas attirer par sa prière la lumière du Christ dans son âme ?

Et cependant qui ne considèrerait avec saisissement  et stupeur la charité que Dieu nous témoigne et l'honneur qu'Il fait aux homme de les admettre à le prier et à converser avec Lui? Car c'est vraiment avec Lui que nous parlons au temps de la prière, laquelle en outre nous réunit aux anges et nous élève bien au-dessus de la condition des brutes. La prière, c’est l'acte des anges; elle surpasse même leur dignité, puisque la dignité angélique est inférieure à la dignité de l'entretien avec Dieu. Cette infériorité, du reste, ils nous l'apprennent par la crainte profonde avec laquelle ils offrent leurs prières; nous instruisant nous-mêmes, lorsque nous aurons à nous approcher de Dieu, à le faire avec crainte et avec joie; avec crainte, car nous pourrions être indignes de la prière; avec joie, car nous devons en être remplis par l'honneur incomparable qui nous est accordé, une race mortelle étant admise à une faveur si haute que de s'entretenir  continuellement avec Dieu, et de s'élever par là au-dessus de la corruption et de la mort. Mortels par notre nature, par la familiarité avec Dieu, nous nous rapprochons d'une condition immortelle. 
Aussi, quiconque s'entretient fréquemment avec Dieu, devient certainement plus fort que la mort et que la corruption. De même que nous n’avons rien de commun avec les ténèbres lorsque nous sommes éclairés par les rayons du soleil, de même, celui qui jouit de la familiarité de Dieu doit être nécessairement supérieur a la mort. L'honneur éclatant dont nous sommes gratifiés, nous conduit lui-même à l'immortalité. Si les personnes qui possèdent la considération de l'Empereur ne peuvent tomber dans l'indigence, à plus forte raison est-il impossible que les âmes qui s'entretiennent et qui conversent avec Dieu, soient soumises à la mort. La mort pour l'âme, c’est l'impiété et une vie de prévarications : par conséquent, la vie pour l'âme consistera dans le service de Dieu et dans une conduite en rapport avec ce service. Or la prière sanctifie notre vie, la rend digne du culte de Dieu, et amasse dans nos âmes d'admirables  trésors. (à suivre)