« Que le but de la prière soit pour nous le regard
porté vers ce mystère de la déification, afin que nous sachions au lieu de quoi
la kénose du Fils unique dans la chair nous a faits ce que nous sommes et d'où,
et où, par la puissance de sa main qui aime l'homme, il a fait monter ceux qui
avaient touché le fond de l'univers, sur lequel nous avait précipités le poids
du péché, et que nous puissions ainsi aimer davantage Celui qui, avec tant de
sagesse, nous a préparé un tel salut. Par ce que nous faisons, révélons que la
prière est accomplie et manifestons, en le proclamant, que Dieu est vraiment
Père par grâce. Mais montrons clairement que nous n'avons pas pour père de
notre vie le malin qui, par les passions de l'infamie, tente toujours de
dominer tyranniquement la nature, et ne prenons pas à notre insu la mort en
échange de la vie, dès lors que chacun des adversaires partage naturellement
avec ceux qui vont vers eux. L'un dispense la vie éternelle à ceux qui
l'aiment. L'autre, en suggérant de céder volontairement aux tentations, suscite
la mort en ceux qui s'approchent de lui.
Car, selon l'Ecriture, il y a deux modes de tentations. L'un
porte au plaisir, l'autre à la douleur. L'un est délibéré, l'autre
involontaire. L'un engendre le péché, et il nous a été ordonné par
l'enseignement du Seigneur de prier pour ne pas y entrer, quand il dit : «Ne
nous laisse pas entrer dans la tentation» et : «Veillez et priez, afin
de ne pas entrer dans la tentation». L'autre protège du péché, en renversant
par des adjonctions involontaires de peines notre penchant à l'aimer. Si on
l'endure avec patience, et surtout si l'on n'y est pas attaché par les clous de
la malice, on entendra le grand apôtre Jacques dire précisément : «Considérez
comme une joie totale, mes frères, de tomber sur toutes sortes de tentations,
car l'épreuve de votre foi suscite la patience, et la patience suscite
l'expérience. Que l'expérience porte en elle une œuvre parfaite.» Le malin,
dans sa méchanceté, s'adonne à deux tentations à la fois, à la tentation
volontaire et à la tentation involontaire. En ensemençant et en excitant l'âme
par les plaisirs du corps, il trame la première pour écarter de l'amour divin
notre désir. Et voulant altérer la nature par la douleur, il sollicite
fallacieusement la seconde, afin d’obliger l’âme abattue, affaiblie par les
peines à émettre les pensées qui vont la séparer du Créateur. »
St Maxime le Confesseur
( Interprétation du Notre Père)
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